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Document Details :

Title: La syntaxe
Subtitle: Une aporie de Saussure, ou une composante secondaire des langues humaines?
Author(s): HAGÈGE, Claude
Journal: Bulletin de la Société de Linguistique de Paris
Volume: 111    Issue: 1   Date: 2016   
Pages: 15-70
DOI: 10.2143/BSL.111.1.3197364

Abstract :
La syntaxe, qu’il s’agisse du système syntaxique d’une langue ou de la discipline qui l’étudie, n’est mentionnée, aussi bien dans le Cours de linguistique générale que dans les Écrits de F. de Saussure, que d’une manière occasionnelle ou transitoire, notamment au sein d’énumérations de diverses rubriques ou de divers ordres d’examen. On s’en étonnerait moins si ce n’était que l’histoire de la science linguistique traverse actuellement une étape qui, dans le sillage de l’enseignement de N. Chomsky, met la syntaxe au centre de la recherche linguistique contemporaine. C’est dans cette perspective que l’on peut déclarer qu’il n’y a pas de syntaxe chez Saussure, ce qui n’a pas été sans embarrasser ses élèves et épigones. Cependant, une dette particulière à l’égard de Saussure est explicitement reconnue dès le début d’un livre qui n’a d’autre objet que la syntaxe, les Éléments de syntaxe structurale de L. Tesnière, injustement demeuré sans grand écho, contrairement à la grammaire générative, qui intronise la syntaxe. Tels sont les points que je traite dans les premières sections (§§ 1-5) du présent article. Ces points m’ont conduit à m’interroger sur l’importance réelle de la syntaxe, comme je le fais dans les sections suivantes (§§ 6-8). Il y apparaît que si l’on examine les phénomènes qui ne relèvent que de la morphologie au sens strict, et donc n’interviennent pas dans l’agencement et les relations réciproques des grandes unités de l’énoncé, si, d’autre part, on analyse les faits qui relèvent de la forme des mots et des syntagmes, mais ont pour rôle d’indiquer les fonctions, et sont donc mis au service de la syntaxe sans lui appartenir directement, le domaine propre de la syntaxe est beaucoup plus restreint que ne peut le faire croire l’inflation actuelle des travaux qui déclarent s’y inscrire. En fait, il faut souligner l’importance d’une sémantique de la syntaxe, et de ce que révèlent les études de syntaxe diachronique. J’en viens donc à me demander si la syntaxe, en réalité, ne serait pas un épiphénomène des processus de vocalisation du sens et de linéarisation de la chaîne. Dès lors, revenant à Saussure, je fais apparaître que la théorie du signe et du rôle purement différentiel des signes les uns par apport aux autres fournit l’instrument nécessaire pour traiter bien des phénomènes qui paraissent relever d’une étude syntaxique faite selon les modèles proliférant aujourd’hui. Il n’y a pas, apparemment, de syntaxe chez Saussure, mais est-ce une grave lacune, et le Genevois ne continue-t-il pas à répondre à nos interrogations?

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