previous article in this issue | next article in this issue |
Preview first page |
Document Details : Title: Une affaire interne. Le sort et la libération des personnes de condition libre illégalement retenues en esclavage sur le territoire ottoman (XVIe siècle) Author(s): VATIN, Nicolas Journal: Turcica Volume: 33 Date: 2002 Pages: 149-190 DOI: 10.2143/TURC.33.0.485 Abstract : La loi islamique appliquée par les Ottomans limitait strictement le droit d'asservir: il était inadmissible de réduire en esclavage des musulmans, des re‘âyâ ou des ressortissants de puissances jouissant d’un 'ahdnâme concédé par le sultan. Pourtant ce scandale n’était pas rare, car une assez forte demande favorisait un marché noir des esclaves. Capturés par force ou par ruse, aux frontières mais aussi à l’intérieur du territoire ottoman, ces esclaves illégaux étaient victimes de pirates, mais également de rebelles, d’autorités locales, de militaires ou de timariotes indélicats, de marchands d’esclaves malhonnêtes, d’escrocs de tous genres enfin (qui s’attaquaient aux plus vulnerables: les femmes et les enfants). Une fois vendus loin de chez eux, les malheureux avaient bien du mal à recouvrer leur liberté. C’était cependant possible, en intentant une action en justice devant le cadi, soit que l’esclave lui-même pût se rendre au tribunal, soit que sa famille et ses voisins ou (s’il était étranger) son souverain portassent plainte. Selon une procédure qui rappelle celle par laquelle les propriétaires récupéraient leurs esclaves en fuite, il leur fallait prouver qu’ils étaient bien de condition libre, en fournissant des témoins, ou en donnant des indications précises sur leurs origines. Pendant le temps nécessaire à l’enquête qui suivait, ils étaient gardés. Les pratiques juridiques et administratives montrent donc que le gouvernement ottoman n’était pas insensible à cette douloureuse question. Quand l’occasion se présentait, l’administration faisait manifestement le nécessaire et libérait les personnes de condition libre selon des modalités différentes en fonction de leur statut, tout en cherchant à éviter la spoliation des propriétaires honnêtes. Dans certains cas, quand les circonstances l’exigeaient et que les conditions géographiques le permettaient, on constate même de grandes enquêtes, sur les rivages maritimes ou le long du Danube. Mais ces mesures étaient toujours temporaires, et il n’y avait pas de politique systematique: dans ce domaine comme dans bien d’autres, la Porte agissait au coup par coup et, le plus souvent, ne faisait que réagir à l’initiative de ses sujets ou d’une puissance amie. |
|